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NEURODIVERSITÉ

Véronique Heuze • 17 juin 2024

Embrassez votre unicité et laissez votre lumière briller. Le monde a besoin de votre perspective unique !

Le terme neurodivergent suggère une personne qui s’éloigne d’une norme; il reflète une réalité où ces personnes font souvent l'expérience de l'exclusion en raison d'un manque de compréhension et d'adaptation de la société à leur diversité neurologique. Je pense qu’il est plus adapté de parler de diversité cognitive ou « neurodiversité ». Cette expression souligne les différentes façons de penser, de raisonner et de traiter l'information, sans jugement de valeur. Elle reconnaît les forces et les défis associés à chaque profil cognitif. Elle reconnaît et valorise la diversité des expériences humaines, sans créer de hiérarchie ou d'exclusion.

En tant que membre d'une famille où les différences cognitives et comportementales étaient présentes, j'ai été confrontée aux défis liés aux étiquettes diagnostiques. Ayant grandi à une époque où ces particularités étaient peu comprises, je me sentais souvent différente sans en saisir la raison. Plus tard, en tant que mère d'un enfant à qui on a attribué plusieurs diagnostics, dont je ne suis toujours pas convaincue 15 ans après, j'ai constaté que ces étiquettes étaient souvent posées sans chercher à comprendre les causes profondes, les causes environnementales, ni proposer de solutions réellement adaptées, ce qui a conduit à une stigmatisation et plus significativement une auto-stigmatisation grandissante. Sans parler du sentiment d’impuissance et de culpabilisation en tant que parent que tout cela a entrainé !

Les étiquettes pour les neurodivergences, bien qu'utiles pour diagnostiquer et offrir des services spécifiques, sont de plus en plus critiquées par plusieurs spécialistes pour leur tendance à simplifier excessivement des réalités complexes. Amanda Kirby, professeure émérite en troubles du développement à l'Université du Pays de Galles et professeure honoraire à l'Université de Cardiff, critique fortement la tendance à trop catégoriser les troubles neurodéveloppementaux. Selon elle, cette approche empêche une compréhension nuancée et complète des individus, négligeant leurs aspects uniques et leurs capacités. En étiquetant les gens, on risque de leur attribuer des caractéristiques stéréotypées qui ne reflètent pas la diversité et la richesse de leurs expériences. Kirby soutient que l'accent devrait être mis sur l'identification des forces et des besoins spécifiques de chaque personne plutôt que sur des diagnostics restrictifs qui limitent leur potentiel.

Simon Baron-Cohen, professeur de psychopathologie du développement à l'Université de Cambridge, partage cette vision, soulignant les dangers de la stigmatisation associée aux diagnostics stricts. Pour Baron-Cohen, les étiquettes peuvent renforcer les stéréotypes et enfermer les individus dans des rôles prédéfinis, limitant ainsi leurs opportunités et leur développement personnel. Il prône une approche intégrée qui considère les forces des individus neurodivers, non seulement leurs défis, et met en avant l'importance de voir les personnes au-delà de leurs étiquettes pour valoriser leurs contributions uniques.

Thomas Insel, ancien directeur de l'Institut national de la santé mentale aux États-Unis, va dans le même sens en critiquant les catégories rigides du DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux). Il appelle à une approche plus flexible et centrée sur l'individu, arguant que les diagnostics traditionnels peuvent pathologiser à l'excès des comportements normaux et conduire à des traitements inappropriés. Pour Insel, les étiquettes peuvent limiter la compréhension des troubles mentaux en simplifiant des conditions complexes et en négligeant les différences individuelles importantes.

Uta Frith, psychologue du développement et professeure émérite à l'Institute of Cognitive Neuroscience de l'University College London, souligne également les risques de surétiqueter les individus, ce qui peut limiter la reconnaissance de la diversité des expériences et des capacités humaines. Elle avertit que les étiquettes peuvent simplifier à outrance des conditions complexes, ne permettant pas une compréhension complète de l'individu. Frith insiste sur la nécessité de voir au-delà des diagnostics pour apprécier la complexité et la diversité des expériences humaines.

Albert Moukheiber, docteur en neurosciences cognitives et psychologue clinicien, ajoute une dimension supplémentaire à cette critique en mettant en avant comment les étiquettes peuvent rigidifier la compréhension des processus cognitifs. Il souligne que les étiquettes peuvent renforcer les stéréotypes et limiter la reconnaissance des capacités et talents uniques des individus. Moukheiber, à travers son travail avec Chiasma, promeut une approche axée sur la flexibilité mentale et la compréhension critique, insistant sur le besoin de comprendre la diversité des expériences individuelles sans les réduire à des catégories fixes.

L'ensemble de ces spécialistes met en garde contre les dangers de s'identifier trop strictement à ces labels. Se définir uniquement par un diagnostic peut limiter la perception de soi et des autres, et restreindre le potentiel de développement personnel. Ils insistent sur l'importance de reconnaître la diversité et la complexité des expériences neurodéveloppementales sans recourir à des catégorisations rigides et restrictives.

Il est essentiel de voir les différences neurodéveloppementales comme des forces plutôt que des limitations. En se concentrant sur les capacités uniques et les perspectives diversifiées que ces différences apportent, nous pouvons encourager une société plus inclusive et compréhensive. Cette approche permet non seulement de valoriser les contributions des individus neurodivers, mais aussi de promouvoir un environnement où chaque personne peut s'épanouir pleinement. En embrassant la diversité et en valorisant les forces uniques de chacun, nous pouvons créer un monde où les différences sont célébrées et non stigmatisées, offrant ainsi à chacun l'opportunité de contribuer et de prospérer à sa manière.

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